Il est temps de mettre un terme au snobisme professionnel

Il est temps de mettre un terme au snobisme professionnel 
Le 8 avril 2014, écrit par Don Quinn Dillon, publié initialement dans Massage Therapy Magazine
Il semble y avoir une tension insidieuse dans la profession de massothérapeute sur la légitimité de la massothérapie thermale.
Dans l’enquête sur les revenus du CMTO (province légiférée pour la massothérapie), les réponses possibles à une question sur les “soins directs aux patients” comprenaient : propre clinique, clinique pluridisciplinaire (non définie), travail à domicile, visites dans des maisons de soins infirmiers ou des entreprises, hôpitaux/autres établissements de soins de santé et centres de remise en forme/clubs sportifs. Le travail dans un spa n’a pas été spécifiquement mentionné comme option d’enquête.
Les bienfaits du massage en spa – relaxation, sentiment de bien-être – sont considérés comme une forme de complaisance plutôt que comme un moyen d’augmenter l’amplitude des mouvements ou de réduire la douleur, grâce à un massage axé sur la rééducation. Et cette tension est profonde. Je rencontre régulièrement des massothérapeutes agréés qui semblent s’excuser de travailler dans le secteur des spas, justifiant ce travail comme une activité transitoire jusqu’à ce qu’ils travaillent dans “une vraie clinique”.
En ce qui concerne les études, certains enseignants bien intentionnés mais partiaux découragent les futurs thérapeutes à travailler “dans un de ces spas”. Sur les réseaux sociaux, des querelles idéologiques éclatent sur la légitimité de la thérapie thermale, et sur la façon dont le secteur des spas entache et rabaisse la profession de massothérapeute de sa véritable place aux côtés de la physiothérapie, des soins infirmiers ou de la médecine.Je trouve cela ironique parce que le massage en spa joue un rôle essentiel dans l’identité de la profession, tout comme le massage de rééducation. La popularité de la massothérapie a connu son plus grand essor avec le boom économique massif de l’après-guerre, à l’époque de l’industrie et de l’information. Le boom économique a entraîné une hausse des salaires et la création des syndicats qui ont négocié des plans d’avantages sociaux généreux et plus de temps de loisirs. Ces conditions ont contribué à certains moteurs économiques clés pour la profession de massothérapeute, dont deux auxquels je ferai allusion dans cet article de blog.

i) Rééducation – le massage était autrefois dispensé, parmi d’autres méthodes et modalités, par des physiothérapeutes et des infirmières dans le cadre du traitement des blessures de guerre et des affections touchant les muscles et les articulations du squelette, comme la polio. Après la guerre, le massage a continué à se différencier en tant que profession autonome, offrant une rééducation pour les blessures liées au travail et à l’automobile, et recevant dans certains cas une indemnisation des assureurs.

ii) Thérapie de spa et bien-être – avec plus de temps et d’argent, les Nord-Américains ont cherché à obtenir des services auprès du spa européen, un haut lieu pour se soigner au-delà de l’objectif du patient en rééducation qui est de soulager les blessures et la douleur. Les Nord-Américains ont afflué dans les spas pour se soustraire aux horaires de travail exigeants. Le massage est l’une des principales applications des spas et comprend diverses formes d’hydrothérapie pour améliorer la relaxation et le bien-être.

Les performances sportives (et le traitement des blessures), les performances et la productivité des travailleurs et le mouvement du potentiel humain ont également joué un rôle dans la prolifération des massages, de la chiropratique et d’autres industries axées sur le bien-être. Par conséquent, la représentation, la réglementation et les formations ont fleuri pour ces professions et leurs praticiens.

Malgré ces origines inextricables de la massothérapie, certains praticiens continuent à définir étroitement la massothérapie dans ce qui semble être une identité reflétant la physiothérapie. Toutefois, les racines, les ressources et l’orientation de la massothérapie diffèrent de celles de la physiothérapie. Au Canada, la massothérapie, bien que réglementée par la loi sur les professions de santé réglementées ou son équivalent dans 4 provinces (5 provinces en 2020), ne bénéficie pas d’une couverture provinciale pour ses services et, contrairement à la physiothérapie, à la chiropratique et à présent à la naturopathie et à l’acupuncture, elle n’est pas exemptée de la taxe de consommation (taxe de vente harmonisée).

La massothérapie qui n’offre pas encore de formation diplômante, souffre d’un manque de pratique fondée sur des données probantes et, comme les parties prenantes ne collaborent pas encore pleinement dans toute la profession sur des problèmes communs, la profession de massothérapeute manque du poids politique essentiel pour faire avancer ses intérêts. Les praticiens qui s’attendent à ce qu’une attention exclusive soit accordée à la rééducation pour améliorer leur sort non seulement sous-estiment la tâche colossale qui les attend, mais ils clivent idéologiquement une partie essentielle des origines de leur profession.

Ceux qui critiquent la massothérapie dans les spas peuvent étayer leur argumentation par des reportages des médias ayant pour sujet les fraudes à l’assurance commises par certains spas. Cependant, un examen plus approfondi montrerait qu’il semble y avoir un nombre égal de rapports citant des fraudes à l’assurance dans des établissements de rééducation supposés légitimes. En effet, les compagnies d’assurance automobile ainsi que la Commission des services financiers de l’Ontario ont intensifié les mesures de lutte contre la fraude à l’assurance dans ces établissements de rééducation.

J’estime que nous devrions critiquer le fonctionnement des établissements de cure et de rééducation qui agissent de manière contraire à l’éthique, mais ne dénonçons pas les avantages directs pour le client ou le patient que procurent les disciplines légitimes.

La légitimité est certainement engendrée par une pratique fondée sur des preuves, mais le plus grand test de légitimité se trouve sur le marché. Dans mon précédent article sur Massage Therapy Canada intitulé “Prenez l’industrie du spa au sérieux“, j’ai examiné le profil du secteur canadien des spas de 2006 (le plus récent disponible). Selon ce rapport, il y avait plus de 2 300 établissements de spa au Canada, et le secteur du spa a connu une croissance annuelle de 17 % depuis 1996. En 2005, le secteur canadien des spas a généré plus d’un milliard de dollars de revenus, dont 49 % provenaient des salles de traitement. En mars 2006, on estimait à 25 900 le nombre de personnes employées par l’industrie du spa, et à 14,1 millions le nombre de visites dans les spas canadiens en 2005. L’industrie du spa occupe environ huit millions de pieds carrés d’espace intérieur.

L’augmentation du bien-être général, la relaxation, la satisfaction de la vie et l’amélioration de la capacité de transformation et de développement personnel sont des résultats thérapeutiques. Dans le texte de CK Andrade, Outcomes Based Massage (Lippincott, Williams et Wilkens, 2014, 3e édition) et dans celui de Dryden et Moyer, Massage Therapy : Integrating Research and Practice (Human Kinetics, 2012), les “domaines, définitions et exemples de résultats pour le bien-être et des systèmes entiers” sont présentés. Andrade poursuit en définissant le modèle d’interactions du bien-être, qui prend en compte non seulement la structure et la fonction du corps, mais aussi les comportements de bien-être, les facteurs environnementaux et la capacité à s’impliquer dans la société.

Il est du ressort de la massothérapie en spa de soulager les raideurs dues à une séance d’exerices ou à de l’arthrite, les tensions musculaires et les maux de tête, les douleurs dorsales et les diverses entorses et foulures. Certaines des preuves les plus solides de l’existence d’un lien entre la massothérapie et les troubles de l’humeur, y compris l’anxiété chronique et réactionnelle. Il est certain que les spas axés sur les bienfaits thérapeutiques de la relaxation et du bien-être jouent un rôle essentiel dans la santé publique.

Ceux qui plaident en faveur des bienfaits de la rééducation par rapport à la thérapie thermale devraient prendre le temps d’examiner les origines de la massothérapie, les secteurs de marché que chaque discipline dessert (clairement très différents) ou la valeur des résultats thérapeutiques au-delà de l’amélioration de la structure et des fonctions du corps. La thérapie thermale est un fil conducteur légitime et essentiel dans les origines et l’avenir de la massothérapie. Le marché le sait – cessons de le combattre.

Mettons un terme aux préjugés et au snobisme intraprofessionnels, qui tentent de réduire toutes les populations et tous les secteurs du marché que les massothérapeutes servent à un groupe étroitement défini.

Embrassons plutôt notre héritage et remettons en question des croyances anciennes mais peu utiles pour faire avancer notre profession collectivement.

Et n’oubliez pas de vous détendre – c’est un résultat thérapeutique souhaité.


Donald Quinn Dillon, massothérapeute agréé, praticien, conférencier et mentor.